La TDS 2015

L'Ultra c'est un de ces Trucs

Cet été fut chargé. Le Mangeur de Cailloux a même oublié de préciser qu'entre la MaxiRace et l'Ultra Marathon du Laugavegur j'ai aussi couru (plutôt marché même) l'Ultra Mitic à Andorre. J'aborde cette TDS un peu fatigué, avec un manque certain de travail spécifique depuis fin juillet même si cette succession de courses de montagne à forcément préparé le corps. Je ne suis pas non plus affuté comme j'aurais aimé l'être pour ces 119km que je prévoyais comme l'objectif de ma saison. Je prends donc la course qui arrive comme une grande fête du Trail, intégrée qu'elle est dans le gros événement de l'été : l'UTMB. Aussi donc, je prévois surtout de me faire plaisir.

Ma TDS

La carte présentée ci-dessus est superbement interactive mais seulement si vous utilisez un ordinateur ou un écran d'une taille supérieure à celui d'un smartphone. Cela fonctionne peut-être aussi sur une tablette.

TDS 2015. 119km, 7250md+, 26h10
Départ Courmayeur à 6h;
Arrivée Chamonix quand on veut

C'est la 3ème fois que je passe la dernière semaine du mois d'août à Chamonix. La première année j'y allais à l'invitation de l'organisation pour découvrir l'événement et en parler (si c'était nécessaire). J'avais surtout pris des photos des courses. L'année dernière je participais à la CCC que je terminais après une longue chevauchée de plus de 20h. C'était l'ère The North Face...

Cette année pour des raisons probables de gros sous, le partenaire historique disparait des plaquettes et c'est le groupe Columbia épaulé par les 2 spécialistes de l'outdoor sportif, Mountain HardWeard et Montrail, qui prend le relai. On ne parle cependant pas du "Columbia Ultra Trail du Mont-Blanc" et la visibilité est partagée entre les 3 marques. Mountain Hardwear produira les fameuses vestes finisher, et Montrail sort pour l'occasion une série limitée UTMB avant d'annoncer son grand retour sur le marché européen en 2016.

Acteur historique du Trail Américain, Montrail arrive en grandes pompes avec cette Bajada II aux couleurs de l'UTMB. C'est un modèle typé trail court(pour moi en tout cas), chaussant étroit, plutôt léger 10mm/20mm, cramponné pour terrain assez sec.

Je prends l'avion pour Genève le mardi après midi, une navette s'occupera du transfert pour la montagne. A l'embarquement je tombe sur Antoine, un camarade qui pratique comme moi le fractionné en côte du coté de Clamart. Il fait aussi la TDS et évidemment le sujet de discussion se projette vers Courmayeur. Nous voici dans le bain plus tôt que prévu.

A Chamonix je suis hébergé par l'organisation à L'ENSA. Je partage ma chambre avec Greg Runner qui est venu se tailler une belle part du massif en participant à la CCC (pim direct son récit ici). Il est arrivé dans l'après midi et m'envoie un message impatient.


Je ne suis pas certain de ses intentions, mais je pense qu'on va bien s'amuser tous les deux!

Une fois le dossard retiré, on se trouve une terrasse pour diner assez tôt. Je reste sage en prenant un plat de pâtes, mais je bois quand même une petite bière pour faire passer le tout. Pas de folie ce soir, le bus m'attend avec plein d'autres coureurs à 4h30 du matin pour Courmayeur!

Courmayeur, 00:00:00

Départ. On traverse Courmayeur. Je suis à peu près dans le premier tiers du peloton, et ça court assez vite. Au bout de quelques kms on entre sur le sentier, une piste de ski qui grimpe assez vite assez fort. Le rythme est lancé.

Maison Veille / Checrouit, 01:10:47

Je me retourne régulièrement, le soleil finit par se lever. Les sommets se montrent dans la lumière matinale et il fait encore assez frais. Rien ne laisse trop présager de la journée chaude qui nous attend, même si Maman Poletti nous a prévenu : "il va faire beau et chaud".
Dans la montée je discute avec un jeune V3. Jean-Louis revient se frotter à la TDS après avoir abandonné l'année dernière à Bourg-Saint Maurice. Je le trouve sympathique, artiste sur les bords, et je lui souhaite bonne chance pour la course. Je ne sais pas encore que je le retrouverai plus tard...

On vient de passer le col Chécrouit et le ravito de Maison Vieille. Le soleil devrait nous toucher dans quelques minutes.

On arrive au ravitaillement de Maison Vieille assez vite, à peine plus d'une heure de course. Je pensais éventuellement manger un bout de banane mais devant l'afflux et la densité de coureurs sur place je ne m'arrête pas. Je profite par contre de tous les points de vue pour faire une photo, les ombres et la lumière du soleil levant dans la vallée sont incroyables.

Arrête Mont-Favre, 02:07:41

Je suis impressionné par les glaciers qui descendent du versant opposé, en provenance directe du Mont Blanc encore caché à cet endroit, dans la montée qui continue vers l'arrête du Mont Favre. Je crois que c'est le Miage, une très longue moraine descend jusque dans le Val Vény, et plus haut la roche dénudée jusqu'au front du glacier qui fond à vue d'oeil. La densité de coureurs est encore importante, on se suit à distance de bâton tendu.

On s’apprête à contourner l'arrête du Mont Favre, le peloton est toujours bien compact. Au train.

Lac Combal, 02:39:17

Après une petite descente on touche le Haut Val Vény, un large vallon au fond duquel se trouve le lac Combal, lieu bien connu des photographes en quête pittoresque. Avec le soleil qui éclaire le versant d'en face le reflet des coureurs dans le lac est incroyable. Je m'arrête évidemment pour immortaliser l'instant.
Un peu plus loin, le ravitaillement est bien venu pour re-charger les bidons et manger quelque chose. Après 2h40 de course matinale je suis encore bien frais et la montée qui suit devrait tempérer ça.

Le Lac Combal est un des lieux de passage mythiques de l'UTMB. Sur la TDS on remonte la vallée, mais la vue est tout aussi splendide avec ce reflet amplifié par le soleil sur le versant opposé.

Col des Chavannes, 03:49:37

C'est la première grosse montée de la course. En quittant Courmayeur il y avait bien cette piste de ski puis Checrouit, mais ici nous sommes en haute montagne. Je suis toujours dans le même train depuis le départ au gré de mes arrêts photos. Deux Brésiliens profitent au maximum de la vue. L'événément est incroyablement international, même ici sur la TDS. J'en suis surpris car j'aurais pensé que seul l'UTMB possède cette aura suffisante pour faire traverser la planête. Les Japonais surtout, ils sont en nombre et très souvent expansifs et joyeux, eux qu'on suppose discrets.

A mi pente on passe sur une petite crête en balcon où un drone nous attend. L'endroit est très photogénique et je fais moi aussi quelques photos. La montée se termine avec le Mont Blanc en arrière plan au Col des Chavannes.

Col du Petit St Bernard, 06:05:20

Au Col des Chavannes, pose avant la longue descente.

Partie roulante! Le col des Chavannes passé on attaque la première longue descente. Descente est un grand mot car il s'agit plutôt d'un large sentier en faux plat où il suffit de se laisser glisser. Les jambes déroulent, la gravité suffit à m'emmener, c'est parti pour une dizaine de kilomètres en direction d'Alpetta. Il est 10h et la lumière a changé. Après les faisceaux rasants sur le Val Vény, la large vallée est éclairée plein axe par un soleil qui sera bien moins amicale après Bourg Saint Maurice.

Après le col, une longue descente très roulante. Le soleil commence déjà à taper, il n'est que 10h du matin

L'air est encore frais et tout serait parfait si je ne ressentais pas un certain échauffement sous le pied droit. Il bouge largement dans la chaussure et je dois m'arrêter pour franchement resserrer les lacets.

Le lieu dit d'Alpetta avant de remonter vers le Col du Petit Saint-Bernard.

Après Alpetta nous remontons légèrement vers le petit Lac Vernet au pied d'un court raidard qui mène au Col du Petit Saint Bernard. Ici quelques bénévoles soucieux de la préservation de l'environnement nous demandent de ne pas utiliser les bâtons sur cette pelouse apparement sensible. Effort bien vain et ridicule balayé par un événement qui les dépasse. 1500 paires de chaussures aux crampons affutés finiront de labourer la zone.

La grande partie herbeuse en single après Verney

Bourg ST Maurice, 08:00:21

Le Col du Petit Saint Bernard est large et plat. Je m'arrête rapidement puis j'enchaine sur la grande descente de la journée : 1200m de dénivelé sur une dizaine de kms suivis de 2-3 kms de plat avant le ravito de Bourg Saint-Maurice. Pris dans l'ambiance je décide de dérouler en allant peut-être un peu vite sur l'ancienne voie romaine. Le soleil tape, mais le vent régulier est agréable. Je crois qu'à ce moment je fais l'erreur de ne pas assez boire, ni manger d'ailleurs. Ou alors je vais un peu vite. C'est en tout cas l'explication que je donne à ce coup de moins bien aux abords du Bourg.

La longue descente vers Bourg Saint-Maurice, j'ai sous-estimé cette section descendante du pacours (15km) et le soleil. J'arrive en bas moins bien que prévu.

J'ai du mal à relancer sur les quelques kilomètres de plat et je me fais doubler par plusieurs coureurs. Il fait chaud dans la vallée et sachant qu'il reste encore le plus dur, je marche un peu dans ce sous-bois ombragé avant le ravito.

Premier des deux gros points de passage, je prends le temps de me poser à Bourg Saint-Maurice. Juste un peu inquiétant, je dois me forcer pour manger. Je sais évidemment que c'est primordial de s'alimenter alors j'insiste et ça passe.

J'allume mon téléphone que j'ai laissé en mode avion depuis le début de la course. Je reçois les sms d'encouragement et je vois que Greg a essayé de m'appeler. Je le rappele et lui diS que j'ai un petit coup de mou.

Après une pause de 25 minutes, on quitte le Bourg pour la plus grosse montée de la course, 1800md+ sur 11km.

Je passe ensuite le contrôle obligatoire du matériel où chacun doit faire la queue 2-3 minutes, puis je sors du ravito. Je croise alors Morgan qui m'aura fait le plaisir de venir m'encourager, son bureau se situant à quelques mètres dans le centre. Elle m'accompagne dans la rue principale (je crois, commerçante en tout cas) et m'indique sans plus de détail dans quelle direction je dois me rendre.
"Tu montes là haut, puis tu contournes la montagne par là, et ensuite le Passeur de Pralognan".
Vu d'en bas, ça a l'air beau. Elle a juste omis d'indiquer que ça allait être long et délicat :), et étrangement à ce moment les 1800m de d+ du profil étaient sortis de ma mémoire.

Fort de la Platte, 10:59:08

On quitte Bourg Saint Maurice, et très vite ça monte raide. On est encore dans les bois mais la chaleur est très présente et la moindre exposition au soleil aggrave les choses. Je peine et je n'arrive pas à maintenir le rythme de mes camarades. Je fais une première pause à l'ombre. Je repars 3 minutes plus tard mais ça ne va pas mieux. A l'occasion d'un replat (je crois d'ailleurs que le lieu dit se nomme le Grand Replat), je préfère m'arrêter derrière un chalet pour m'allonger et tenter ce qui m'avait beaucoup aidé lors de l'Ultra Mitic : une sieste. Là je trouve un autre coureur déjà allongé. Il vomit dès qu'il boit, il est mal barré. Je ferme les yeux, je ne dors pas vraiment mais je sens que cela me fait du bien.

Le Fort de la Platte. Il n'y a pas de ravito ici, seulement de l'eau.

En repartant, ça va mieux. J'ai refroidi, mon cardio est descendu et cette fois-ci j'avance en phase avec le peloton. On arrive sur les alpages au premier des deux forts, plutôt une ruine d'ailleurs ce Fort du Truc. J'ai zappé qu'il existait et je crois que c'est le Fort de la Platte indiqué sur le profil de course. Je m'attends donc à un point d'eau mais rien évidemment. Je mettrai finalement 2h30 (sieste comprise) pour rallier La Platte.

J'ai vu de nombreux coureurs arrêtés sur le bord pendant toute la montée, le soleil n'était pas notre ami.

Passeur de Pralognan, 12:46:03

Dès lors je suis plutôt bien. Je fais très attention à boire et manger régulièrement. Je retrouve mon V3 allongé à l'ombre. Il me dit qu'il n'arrive pas à manger. Je tente de le motiver "aller c'est bon, t'as passé Bourg, prends le temps tu sais que ça va passer".

Je continue à mon rythme plutôt correct jusqu'au Col de La Forclaz qui nous soulage tous. La petite descente par les lacs permet aussi de délier les jambes avant la montée finale jusqu'au Passeur. Progressivement les écarts se creusent, sans pour autant qu'on se retrouve seuls. On commence à reconnaitre quelques visages, on échange sans trop parler sur cette même galère.

Un des cinq lacs de Forclaz, avant une légère redescente.

Au sommet je fais une pause de quelques minutes pour manger, pour immortaliser l'instant aussi lorsqu'un camarade me prend en photos. Il reste encore un sacré bout de chemin mais je me sens beaucoup mieux, le gros de la chaleur est passé et je sais déjà que je vais finir.

Vue depuis le Passeur de Pralognan en regardant derrière moi. Le Mont Pourri, la Grande Casse, la Grande Motte.

Cormet de Roselend, 13:45:40

Le début de la descente est très technique. Les bénévoles ont installé une corde pour sécuriser le passage. On enchaine ensuite sur un pierrier puis progressivement le sentier redevient roulant. A mi-distance du ravito du Cormet de Roselend on est même sur une piste carrossable où j'arrive à bien courir, doublant plusieurs coureurs. La lumière de fin de journée est splendide, On retrouve le Mont Blanc qu'on avait laissé le matin en passant le Col des Chavannes. Il semble pourtant bien loin, ce qui me fait mesurer la distance qu'il reste encore à parcourir.

La fin du jour approche, val fleuri et reflet dans un ruisseau.

J'arrive au Cormet de Roselend au coucher de soleil. Je profite vraiment du moment en prenant de nouvelles photos. Je suis en forme même si mon genou gauche commence à tirer et annonce une petite tendinite.

Arrivée en contre jour au Cormet de Roselend.

Au ravito je mange bien en prévision de la nuit qui arrive. Petit contrôle général : Les jambes sont en forme, mes pieds pourraient être plus frais surtout le gauche où j'ai sans doute développé une ampoule à l'arrière du talon. Plus embêtant je trouve, cette amorce de tendinite. Je me masse l'exterieur du genou au Nurofen récupéré dans le drop bag et que je prends soin de garder avec moi en prévoyance. Je change de t-shirt pour le plaisir en enfilant ce tissu technique rapporté d'Andorre et à la différence de mes camarades qui ont déjà sorti leur veste pour la nuit je pars pour cette première étape les bras nus.

La nuit et une autre course commence.

Je retrouve aussi mon V3 qui semble clairement avoir repris des forces. On discute un peu en quittant le ravito, ce gars est vraiment très sympa. J'apprends qu'il a fait beaucoup de vélo plus jeune et qu'il ne s'est mis à courir vraiment que vers 45-50 ans! Il me confie qu'il vise le podium dans sa catégorie :)

La Gitte, 15:57:17

A partir de Roselend il n'y a plus vraiment de grosse montée. Evidemment le Col du Tricot en fin de parcours est un morceau, mais rien de comparable à ce qu'on a vécu après Bourg Saint-Maurice dans l'après midi. Je prends aussi quelques dernières images au crépuscule. Les frontales s'allument et au loin, très loin, on devine ceux qui sont encore au Passeur de Pralognan. La nuit commence pour tout le monde!

Un peu plus haut en approchant le col de la Sauce un regard en arrière. Le ravito du Cormet de Roselend à droite, et au fond on distingue ceux qui descendent du Passeur de Parlognan. Ils sont à ~1h30.

J'ai un souvenir assez vague du Col de la Sauce. J'ai l'impression d'être déjà arrivé à La Gitte et pourtant je vais mettre plus de 2h pour m'y rendre. Il y a pourtant ce grand classique de la région, la descente par le chemin du Curé taillé dans la roche à flanc de falaise. L'endroit doit être splendide en pleine journée. Je m'arrête quelques instants pour éclairer les lieux de ma frontale, je pourrais être chez Tolkien sur un de ces uniques sentiers incontournables qu'il faut prendre pour accéder à la prochaine étape de la quête. Il ne faut pas se tromper, le torrent est à deux pas et il est mortel, la falaise en surplomb est infranchissable, il n'y a pas le choix il faut avancer.

Col Joly, 18:34:11

En quittant La Gitte je me fais doubler par mon V3 qui avance vraiment vite. Je ne vais pas le revoir avant l'arrivée. Je suis toujours en mode économique dans les montées mais en essayant d'exploiter au mieux mes bâtons.

Le Col est de la Gitte ouvre sur une sorte de large plateau d'altitude, je ne connais pas du tout l'endroit. Il fait nuit mais la pleine Lune illumine l'endroit. Je coupe ma frontale pour en profiter. Sur la droite, le Mont-Blanc brille. Les montagnes proches projettent leur ombre. Au loin devant et vers la gauche un autre massif que je ne connais pas. L'endroit est superbe et j'aimerais prendre mon temps. J'aurais aussi aimé qu'il y ait moins de monde car à tout moment une frontale vient perturber ce calme. Je me souviens de la seconde nuit lors de l'Ultra Mitic, j'étais dans une autre dimension.

Au loin nous voyons le ravitaillement suivant, celui du Col Joly. Je discute avec un gars du Nord, Maxime. On parle de plein de choses comme si nous étions de vieux potes, c'est souvent comme ça. On avance au même rythme avec un Allemand. Alors que le ravito semble tout proche les fanions nous font bifurquer en direction d'un petit passage bien raide qui nous fait nous taire pour gromeler. On arrive au Col du Joly sous le son d'une sono tonitruante qui contraste un peu trop à mon goût avec le calme de ce long passage que nous venons de traverser depuis La Gitte.

En prévoyance de la descente qui arrive, je me repasse un peu de Nurofen sur le tendon. Je vais le faire à chaque ravito d'ici l'arrivée même si cela me fait perdre quelques minutes à chaque fois, mieux vaut prévenir que guérir (si on peut le dire ici...).

Les contamines, 20:18:56

Maxime repars quelques minutes avant moi, mais je le rattrape assez vite dans cet exercice que j'affectionne : la descente. Je double plusieurs coureurs jusqu'à Notre Dame de la Gorge. Je passe devant l'église que j'avais découverte en 2012 lorsque je suivais l'UTMB. On reprend ainsi une partie du parcours du 170 en sens inverse. C'est plat sur quelques kilomètres et j'alterne course et marche rapide propulsée par les bâtons. Marche nordique diront certains.

François d’Haene, leader aux Contamines, futur vainqueur de l’UTMB 2012, sous les clameurs et les flashs des spectateurs. Voir mon portfolio de l'UTMB 2012

Aux Contamines, je discute avec beaucoup de plaisir avec un bénévole. C'est lui aussi un coureur et pendant que je mange et refais le plein de vivres, il me détaille ce qui m'attend sur la fin de parcours. Mon camarade Maxime arrive quelques plus minutes après moi mais repars très vite, fidèle à sa stratégie de course : ravito express. Il fera d'ailleurs une superbe fin de parcours en me mettant 35 minutes sur ces 24 derniers kilomètres. Bravo gamin!

Col du Tricot, 22:54:03

C'est le dernier morceau. La montée vers le Col du Tricot se fait en deux étapes, d'abord jusqu'aux chalets du Truc (deuxième truc de la course avec le Fort en ruine), puis après une courte descente sur le chalet de Miage la montée en lacets jusqu'au col.

Je fais une petite pause avant d'attaquer la finale. La vue n'est pas rassurante, on voit clairement les frontales dessiner les virages et le col éclairé par un gros phare installé par les bénévoles. C'est le dernier effort. Nous sommes trois à monter de concert et je suis encore efficace. En tout cas je continue à pousser sur les bras et il me reste du jus.

Je bascule sans attendre dans une descente nettement moins pentue jusqu'à la passerelle qui enjambe le pied du glacier de Bionassay. Il fait encore nuit et je ne vois pas grand chose du paysage. Je ne prends même pas le temps de m'arrêter et profiter de l'endroit, sans doute fatigué ou moins lucide, ou simplement parce que je veux terminer.

Bellevue, 23:59:07

Le sentier qui suit jusqu'à Bellevue est en sous-bois et probablement assez ludique en temps normal mais évidemment moins amusant après 110km de montagne. On traverse des rails (tout à fait normal en montagne, je comprends en écrivant cet article qu'il y a un tramway qui monte les touristes jusqu'au "Nid d'Aigle") avant de redescendre sur les Houches. Mon ampoule au talon semble tenir le rythme et j'arrive même à doubler dans les derniers lacets en bitume juste avant le ravito.

Une nuit passe si vite. Dans la descente de Bellevue vers les Houches, le soleil se lève sur la vallée de Chamonix.

Les Houches, 24:51:15

Le ciel est bleu nuit et quelques nuages rouges annoncent le soleil. Je vois toute la vallée de Chamonix, les lumières des villages et les crêtes qui se découpent au loin. Evidemment je vais finir et l'idée d'arriver en début de matinée me plait, commencer une nouvelle journée après cette longue parenthèse en montagne.

Arrivée aux Houches, il est 6h40. Chamonix n'est plus très loin, là bas.

Aux Houches, je prends le temps de m'occuper de mon genou et j'enlève ma petite polaire pour terminer en t-shirt. La plupart des coureurs filent dans s'arrêter, pressés d'en finir. Peu importe, je ne suis pas à 5 minutes et pour moi la course est déjà terminée. D'ailleurs la suite ne m'enchante pas vraiment, courir 8km en bord de rivière... je préfère nettement l'arrivée à Chamonix par La Flégère.

Chamonix, 26:10:02

En quittant le ravito j'envoie un SMS à Greg "Je suis aux Houches, j'arrive vers 8h30", mais finalement j'arrive à bien courir et je corrige mon annonce d'un complémentaire "Ou peut-être plus tôt". Le bitume en entrant dans Chamonix annonce l'arrivée à 2km. Je profite une dernière fois de ces moments seuls dans cette rue sans spectateurs.
Au dernier kilomètre je vois Greg au rond point et cela me fait bien plaisir. Je manque même de me faire une entorse en descendand du trottoir, le comble!
Il court avec moi dans la rue. Il est 8h10 et les gens commencent à sortir, prennent leur café en terrasse. Leurs applaudissements me font évidemment plaisir, mais j'ai à nouveau cette sensation mitigée : Je ne vibre pas comme le font ceux qui décrivent leur arrivée incroyable à Chamonix. J'avais en fait beaucoup plus de plaisir de voir le soleil se lever depuis les hauteurs des Houches, peut-être le blues de la fin du voyage.

8h10 sur la ligne d'arrivée, content de ma course.

Greg en coureur habitué s'éclipse sur les derniers mètres pour que je profite seul, j'apprécie. La ligne franchie je vois Apostolos qui m'applaudit, il a suivi ma progression et a fait en sorte d'être à l'arrivée ce matin. C'est génial. Je retrouve aussi mon V3 assis sur une chaise du coté du buffet des Finishers. Il a méchamment terminé en finissant 1h10 avant moi alors que nous étions encore ensemble à La Gitte. Encore mieux, il gagne la course dans sa catégorie!

Post race

La TDS a cet avantage de se courir du mercredi au jeudi, en amorce d'UTMB. On peut donc profiter au maximum de la suite des événements avec les coureurs de la CCC et de l'UTMB qui partent le vendredi. Après une bonne sieste jusqu'à midi, je rejoins Greg et Apostolos pour déjeuner. A table je retrouve Adrien Marlault le meilleur supporter au monde et Carine qui va courir la CCC pour la 3ème fois. Elle passe tous ses tuyaux à Greg. Cécile Bertin est là aussi. Elle ne dit à personne qu'elle va courir l'UTMB, et elle ne sait pas encore qu'elle va abandonner.
Le soir je rencontre aussi le très sympathique Sébastien Réby de globe-runners.fr après un passage à l'apéritif organisé par Columbia où je discute 5 minutes avec un Sylvain Bazin tout juste rentré du Québec.

Malgré un printemps/été un peu chargé en courses, je suis très satisfait de ma TDS. Je partais en pensant qu'il me manquait de la fraicheur mais aussi l'entrainement spécifique qu'il convient pour ce type d'effort. Pourtant je termine 388/1809 (21%) ce qui est plutôt dans la tranche supérieure de ce que je vaux, tout en sentant qu'il m'en restait pour continuer (j'avais encore du jus sur la fin). Je me demande donc si l'enchainement des courses n'a pas eu un effet positif, comme celui de longues sorties longues. Je confirme aussi que je suis vraiment attiré par l'ultra, l'immersion, l'introspection et ces longs moments hors du temps, les levers de soleil seul en montagne, cette plénitude lorsque la ligne d'arrivée n'est plus un objectif.

Apostolos qui m'accueille. Photo © GregRunner

Ces photos on été prises durant la course tant qu'il faisait jour. Pour la nuit, les souvenirs sont dans ma tête.

On vient de passer le col Chécrouit et le ravito de Maison Vieille. Le soleil devrait nous toucher dans quelques minutes.

Je dirais les aiguilles de Trélatête et des Glaciers.

On s’apprête à contourner l'arrête du Mont Favre, le peloton est toujours bien compact. Au train.

La vue sur le Val Vény réveillé par le soleil était sublime. Je m'arrête vraiment souvent pour en profiter.

Dernier regard en arrière, la journée commence.

Petite descente après l'arrête du Mont Favre en direction du Lac Combal.

Le Lac Combal est un des lieux de passage mythiques de l'UTMB. Sur la TDS on remonte la vallée, mais la vue est tout aussi splendide avec ce reflet amplifié par le versant opposé.

Après le Lac Combal, attaque de la montée vers le Col des Chavannes. Ca grimpe et les grappes se forment.

Minicrête idéale pour isoler les coureurs de l'arrière plan si vous êtes équipés avec le bon matériel.

D'ailleurs le pilote du drône ne s'est pas trompé, l'endroit est plutôt photogénique. Le Mont Blanc en arrière plan.

Arrivée au Col des Chavannes. Le gars devant est Brésilien, et il trouve que "quand même" ça monte plus que par chez lui.

Col des Chavannes

Après le col, une longue descente très roulante. Le soleil commence déjà à taper, il n'est que 10h du matin

Le lieu dit d'Alpetta avant de remonter vers le Col du Petit Saint-Bernard.

La grande partie herbeuse en single après Verney

Le Lac Verney. C'est ici que deux bénévoles demandaient aux 1600 coureurs de ne pas utiliser les bâtons pour protéger la flore...

La longue descente vers Bourg Saint-Maurice, j'ai sous-estimé cette section descendante du parcours (15km) et le soleil. J'arrive en bas moins bien que prévu.

Après une pause de 25 minutes, on quitte le Bourg pour la plus grosse montée de la course, 1800md+ sur 11km.

Vue sur Bourg Saint Maurice dans la montée et encore dans les bois.

Non loin du premier fort, le Fort du Truc. Je crois, ou bien juste après.

Le Fort de la Platte. Il n'y a pas de ravito ici, seulement de l'eau.

J'ai vu de nombreux coureurs arrêtés sur le bord pendant toute la montée, le soleil n'était pas du tout notre ami.

Enfin le col de la Forclaz, un petit replat et une descente avant le dernier morceau jusqu'au Passeur.

Un des cinq lacs de Forclaz, avant une légère redescente.

Vue depuis le Passeur de Pralognan en regardant derrière moi. Le Mont Pourri, la Grande Casse, la Grande Motte.

Pose au Passeur. Je suis content mais assez entamé, même si je reprends progressivement des forces.

La descente engagée où des cordes ont même été posées pour rassurer des coureurs aux jambes lourdes.

Formation étrange avant de passer le ruisseau de la Neuva. A droite au soleil, Monsieur Mont-Blanc. Il va falloir penser à revenir vers Chamonix...

La fin du jour approche, val fleuri et reflet dans un ruisseau.

Arrivée en contre jour au Cormet de Roselend.

Au ravito, on récupère notre sac. J'y ai mis un t-shirt de rechange et quelques gels. Merci aux Bénévoles !

A mon allure, le soleil se couche lorque je sors du ravito de Roselend.

La nuit et une autre course commence.

Un peu plus haut en approchant le col de la Sauce, un regard en arrière. Le ravito du Cormet de Roselend à droite, et au fond on distingue ceux qui descendent du Passeur de Parlognan. Ils sont à ~1h30.

Une nuit passe si vite. Dans la descente de Bellevue vers les Houches, le soleil se lève sur la vallée de Chamonix.

Arrivée aux Houches, il est 6h40. Chamonix n'est plus très loin, là bas.

8h10 sur la ligne d'arrivée, content de ma course.

Apostolos qui m'accueille. Photo © GregRunner

Merci à tracedetrail.fr auprès de qui j'ai récupéré la trace gps, ma Garmin Fenix impotente étant tombée en rade de batterie aux Houches.