125km non balisé et hors sentiers
La Xreid est une course originale, à plusieurs titres. L'événement change d'endroit chaque année. Il y a eu le Johtunheimen (la maison des Dieux en norvégien), un massif très minéral et alpin, il y a eu l'île de Senja au nord du pays, puis cette année le sud avec un parcours de 125km entre Voss et Bergen l'arrivée de l'épreuve. La chose la plus intéressante concerne le balisage... qui n'existe pas. Il y a aussi une barrière horaire assez exigeante. En somme une course difficile.
📷 XReid Norway | 125km non balisé et hors sentiers
J'arrivais quelques jours précédent la course à Voss, la ville départ de cette édition 2019 de la Xreid. Posé dans une maison d'hôtes fort charmante un peu à l'écart du centre (je recommande), une ancienne ferme norvégienne rénovée pour accueillir les touristes dans un cadre typique, je suis allé me dégourdir les jambes sur les hauteurs alentour. Je retrouvais ainsi les paysages que j'avais déjà côtoyés il y plusieurs années lors de quelques treks vers Hardangervidda et Johtunheimen: la montagne norvégienne.
L'hôtel Store Ringheim où je suis logé quelques jours avant la course. On y mange bien, la vue est belle et le propriétaire aura le plaisir de vous raconter l'histoire de la ferme à une époque où la vie était bien différente.
La Xreid, cette course technique, engagée et qui va à l'essentiel: progresser en montagne
L'organisateur fourni la trace de la course et chacun se débrouille avec. Il faut donc être équipé au minimum d'un gps capable de lire le gpx. La montre peut suffire mais je recommande d'avoir un vrai gps, ou le smartphone en backup, bénéficiant d'un fond de carte topographique permettant de naviguer à vue sur le terrain.
La course est aussi très technique, comme toutes les courses norvégiennes auxquelles j'ai participé. Il y a bien parfois des balisages, mais très souvent les sentiers sont trop peu fréquentés pour qu'une trace visible se fasse au sol. Sur le début de la Xreid 2019 jusqu'au premier ravito la course suivait un sentier officiel marqué du T rouge de la DNT l'association des randonneurs norvégien, mais sur la majeur partie du parcours il faut naviguer hors piste à l'appréciation de ce qu'indiquent quelques traces de sentier sur le sol et le relief du terrain. Cela rajoute donc à la difficulté de la course qui requiert toujours de la lucidité, ce qui n'est pas évident après de longues heures seul.
Au retrait du dossard nous donnons les 3 sacs de délestage auxquels nous avons droit. J'y ai mis mes vivres de courses, quelques barres maisons que j'aime avoir plus que les gels et autres barres énergétiques du marché. Il n'y a que 3 ravitaillements sur la course, espacés de ~30km chacun ce qui rajoute encore à la difficulté de l'épreuve: il faut être autonome pendant au moins 6-8h le temps qu'il faudra à un coureur moyen pour parcourir chaque section. Sachez aussi que les ravitos officiels de l'orga sont plutôt réduits: bananes, chips, RebBull (aïe) et quelques biscuits d'une marque norvégienne que je ne connaissais pas. Je vous conseille donc de bien charger les sacs de délestages en nourriture consistante.
Le terrain est donc différent d'une année sur l'autre. Dans le sud ici entre Voss et Bergen il n'est pas trop alpin, on progresse entre plateaux érodés et zones tourbeuses. C'est une autre histoire dans le Jotunheimen ou sur Senja, régions plus minérales. Cette année, le parcours d'environ 130km et 7000m de dénivelé positif aura été bouclé en 22h10 pour le vainqueur, 23h40 pour le deuxième et 25h18 pour la première femme. Ces temps sont conséquents au regard du combo distance/dénivelé, je vous laisse imaginer la technicité du terrain.
Par endroit, en particulier sur la crête entre les deuxième et troisième ravitaillements, il faut resté collé au GPS au risque de s'embarquer sur un cul de sac ou un mur de 30m infranchissable. A plusieurs reprises avec mon camarade du moment j'ai du faire demi-tour, revenir sur mes traces, avancer à vue et à tâtons. Le vainqueur, local, avait reconnu le terrain plusieurs fois pour s'assurer des bons passages.
Lacs de montagne en redescendant sur le premier ravito au km35
Progression sur terrain humide, tourbes et marécages. Sans balisage ni trace de sentier, on avance au gps. Ici par exemple nous savions qu'il fallait passer le lac sur la gauche puis bifurquer à gauche dans la vallée. A nous ensuite de prendre la meilleure trajectoire... Courir en groupe n'est pas toujours la meilleure option car on fait naturellement confiance au premier coureur qui fait la trace, et qui peut se tromper. A un moment j'ai préféré prendre de l'avance et décider par moi-même, je me sentais plus à l'aise que de dépendre de personne par forcément plus efficaces que moi.
Coucher de soleil sur une crête enneigée
Une fois arrivé sur la crête enneigée, on se repère facilement en suivant les traces des autres coureurs. Les choses se compliquent nettement en redescendant, lorsque la trajectoire est beaucoup moins évidente. A plusieurs reprises on doit s'engager à vue, faire demi-tour, tenter un autre passage. Il ne s'agit évidemment plus du tout de courir mais de progresser sur un terrain complètement inadapté aux courses de trail telles qu'on les imagine en France. C'est ainsi une des courses les plus rustiques à laquelle j'ai eu l'occasion de participer avec l'UltraFiord en Patagonie ou l'Ultra Norway Race dans les Alpes de Lyngen.
Je n'ai pas terminé la course. Sans doute l'enchainement des épreuves cette année, mais aussi la difficulté des barrières horaires avec lesquelles j'ai commencé à fleureter à mi-course. 2 heures d'avance au premier ravito (35km), plus que 45 minutes au deuxième ravito (65km, vous noterez aussi les distances conséquentes entre chaque ravitaillement), les bénévoles sur place m'apprenant qu'à cette allure j'aurais du mal à passer le 3ème dans les temps. J'ai préféré arrêter plutôt que de m'esquinter 2 semaines avant le Nuts Yllas Pallas en Laponie finlandaise.
La Xreid, une course pour les traileurs avertis ET d'un assez bon niveau
J'ai comme d'habitude aussi réalisé une vidéo de la XReid, mais ne vous appuyez pas trop sur ce récit puisque chaque année la course a lieu dans un endroit différent.