L'envie de continuer
C'est mon deuxième UTMB. La première fois c'était en 2016, l'aboutissement de trois années de progression physique nécessaire pour l'accomplissement d'un tel objectif. L'accumulation d'expérience aussi, l'appréhension d'une telle distance, comment le corps peut tenir évidemment mais surtout comment l'esprit se comporte pendant 40h d'effort.
📷 UTMB 2018 | L'envie de continuer
J'avais terminé la course en 2016. Non sans souffrance, les pieds douloureux des Courmayeur, très douloureux après Champex. Cette année je pensais mieux faire, une expérience des courses longue distance plus importante, une meilleure capacité à relativiser l'effort sur le long, l'enchaînement des courses qui confirme que sauf événement improbable je vais au bout des épreuves. Pourtant...
Le départ de la course se fait sous la pluie et les prévisions pour la nuit ne sont pas très bonnes. L'orga annonce jusqu'à -10°C ressentis aux cols et demande aux coureurs de prendre le kit grand froid (nouveau dans le matériel obligatoire UTMB) mais cela ne refroidit pas l'ambiance et je coupe la caméra pour en profiter. Je mesure mon départ. Je retrouve plusieurs amis sur le parcours qu'ils courent ou qu'ils encouragent les coureurs. L'équipe Terres d'aventure avec qui j'ai déjà partagé de bons moments sur la TransGranCanaria et le Lavaredo et que je devrais croiser l'année prochaine sur le Marathon des Sables (oui c'est prévu). Je rencontre Olivier Blanc de l'association Imagine for Margo dans la première montée après les Houches, Jean Philippe Allaire qui me fait rêver avec son Treg une superbe course dans l'Ennedi au Sahara.
J'arrive à Saint Gervais de bonne humeur, puis aux Contamines toujours de bonne humeur. C'est ensuite l'ascension vers le Col du Bonhomme, l'entrée dans la course. Et la nuit. Je ne suis pas au mieux dans les deux longues montées du Bonhomme et de la Seigne. Estomac en délicatesse avec ce que je lui donne à gérer. Pourtant cela m'arrive très rarement, j'ai la chance d'avoir un estomac tolérant et de n'avoir jamais eu à vomir en course. Cette sensation disparait naturellement en arrivant au Lac Combal qui annonce le nouveau jour. Comme toujours l'endroit est superbe.
J'arrive à la base vie de Dolonne à 8h39 un peu en avance sur mon timing, mais je suis bien. C'est la deuxième partie de la course, le balcon entre Bertone et Bonatti puis le Grand Col Ferret. J'ai un peu de mal à me relancer dans la montée sur Bertone, l'estomac bien rempli et en plein travail en sortant de Courmayeur, mais je fais une belle traversée jusqu'à Arnouva où je retrouve Guillaume. Je suis surpris de le retrouver là car c'est un excellent coureur. Il est franchement plus véloce que moi. Il a des soucis d'estomac, justement, et ne peut trop rien avaler depuis plusieurs heures.
Nous repartons ensemble et faisons l'ascension du Grand Col à deux. C'est sympathique et cela permet de nous motiver pour la suite. Nous basculons au sommet mais il préfère lever le pied et me laisse partir devant. J'avance toujours à bonne allure et même si je pense être parti un peu vite sur cet UTMB j'en suis déjà à 100km. J'arrive à La Fouly à 16h57 et je n'y reste que 8 minutes. Mes quadris commencent à fatiguer mais je me sens assez bien. Pourtant la suite ne s'est pas du tout passée comme je l'envisageais. En arrivant à Champex, en entrant dans le ravito j'accuse un peu le coup. C'est normal après la longue section roulante en fond de vallée vers Praz de Fort, mais rien de dramatique. Pour autant, tout va s'accélérer.
Je prends une soupe, je me pose sur un banc et mon état mental va basculer en moins de 5 minutes. Je commence à penser à ce qui m'attend, la nuit et les 2 terribles montées de Bovine (La Giète) et Catogne (Les Tseppes). Je les connais pour les avoir déjà passées plusieurs fois, sur la CCC, l'UTMB en 2016 et l'OCC l'année dernière... et je crois que je n'ai pas envie d'y retourner. Très vite en quelques minutes je change d'état. Alors que je n'avais jamais ressenti cela je découvre l'envie d'arrêter, je suis submergé par cette force. Je n'ai plus envie d'y aller. J'ai beau raisonner en me disant que c'est temporaire, qu'il suffit d'attendre un peu pour que cela revienne, mais non. J'ai décidé que cela suffisait.
C'est donc la première fois que cela m'arrive, disons de cette manière. C'est la 3ème fois que j'arrête une course avant la fin. La première c'était pendant le MIUT sur entorse, la seconde fois sur la Ronda après m'être perdu pendant 1h30 au début de la course. Ici c'était différent, je n'avais juste plus envie, plus de motivation. Je le mets en partie sur ma grosse consommation de course, j'enchaine beaucoup et notre sport est très exigeant. Courir plus de 100km en montagne n'est pas chose aisée et sans une forte envie ça l'est encore plus. Je crois aussi que le fait d'avoir déjà terminé l'UTMB a accentué l'effet.
Vidéos de l'UTMB
Je vous suggère évidemment de regarder mes vidéos. Cette fois-ci j'en ai fait 3, la première sans paroles qui tente de montrer l'ambiance dans le peloton, l'atmosphère sur la course. Les deux autres sont plus à mon habitude et dans mon style.
Ambiance sur l'UTMB, une petite vidéo réalisée en partie grâce à Wider Magazine!
Vidéo UTMB 2018 part1
UTMB 2018 part2